Droit à l’information des patients préalablement à un acte médical
Le Conseil d’Etat précise les contours du droit à l’information des patients sur les risques connus d’un acte médical et les modalités d’appréciation de la perte de chance, en l’absence d’une telle information, d’éviter la réalisation de ces risques.
CE, 19 octobre 2016, Centre hospitalier d’Issoire et autres, n° 391538, A.
Le code de la santé publique (article L. 1111-2) reconnaît un droit des patients à être informés sur leur état de santé, ce qui implique pour les professionnels de santé d’informer sur les actes et traitements proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, mais également sur leurs risques.
Mme V. avait subi en 2007 une intervention nécessitant une anesthésie locale dans un centre hospitalier, dont elle avait conservé des séquelles sensitives et motrices à la jambe gauche. Elle n’avait toutefois pas été informée par le centre hospitalier des risques que comportait cette anesthésie et n’avait pu ainsi prendre une décision en connaissance de cause. En pareil cas, la responsabilité de l’hôpital peut être engagée en vue d’obtenir la réparation du préjudice subi, et c’est la perte de chance d’éviter ce dommage qui est alors indemnisée. La difficulté que présentait l’affaire soumise au Conseil d’Etat tenait à la très faible probabilité de réalisation du risque lié à l’anesthésie : en effet, la littérature scientifique relevait que paralysies transitoires pouvaient survenir à la suite d’anesthésies locales telles que celle pratiquée dans 0,1 % des cas et des paralysies définitives dans 0,02 à 0,03 % des cas.
Le Conseil d’Etat a alors précisé les contours de l’obligation d’information sur les risques, en combinant deux critères : la fréquence de leur réalisation d’une part et leur gravité d’autre part. Ainsi, doivent être portés à la connaissance du patient, préalablement au recueil de son consentement à un acte médical, les risques connus de cet acte qui soit présentent une fréquence statistique significative, quelle que soit leur gravité, soit revêtent le caractère de risques graves, quelle que soit leur fréquence. Le caractère exceptionnel de la réalisation d’un risque de décès ou d’invalidité répertorié dans la littérature médicale ne dispense pas les médecins de le porter à la connaissance du patient. Par ailleurs, la décision précise que la perte de chance d’éviter l’accident qui résulte du défaut d’information doit tenir compte du caractère exceptionnel de ce risque et de l’existence d’autres informations sur des risques de gravité comparable qui ont été données au patient.
En l’espèce, le Conseil d’Etat a validé le raisonnement de la cour administrative d’appel qui avait indemnisé Mme V. : alors même qu’ils ne se réalisaient qu’exceptionnellement, les risques connus de l’anesthésie subie constituaient des risques graves normalement prévisibles et auraient donc dû être portés à la connaissance de la patiente.
Source : Lettre de la Justice Administrative n°45-Décembre 2016 du Conseil d'Etat