La Ville d'Orléans vient de signer un protocole avec cette université internationale. Les premiers étudiants, sélectionnés par concours, commenceront leurs études dès septembre 2022, dans la cité johannique. Le cursus délivre un diplôme européen, reconnu par la France, donc. Les droits d'inscription, assez élevés, pourraient donner droit à des aides financières.
Agir et proposer du concret. C'est l'obsession partagée du maire d'Orléans, Serge Grouard, et de son premier adjoint en charge de la santé, Florent Montillot.
"Il n'y a plus le temps d'attendre et de faire des ronds dans l'eau. C'est une question de vie ou de mort", martèle l'édile, conscient de l'urgence et de la gravité de la situation.
Les chiffres qu'il a rappelés en préambule, parlent d'eux-mêmes : le nombre de généralistes pour 100.000 habitants en France est de 123,8. Dans le Loiret, il est de 59... "La désertification médicale, c'est notre point faible et ça pose problème pour l'attractivité du territoire", reconnaît sans problème Serge Grouard.
Pourtant, il rappelle les initiatives prises par la Ville (qui n'a pas la compétence santé, prérogative de l'État), entre la création de maisons de santé et le futur centre de santé municipal.
"Mais tous les efforts n'y suffisent pas. La question fondamentale, c'est la formation d'étudiants", martèle le maire.
C'est pourquoi, il a dévoilé ce jeudi, en conférence de presse, avoir fraîchement signé, la semaine dernière, un protocole avec la faculté de médecine de Zagreb. Objectif : qu'elle forme des étudiants à Orléans. Une initiative inédite en France. On vous explique tout.
De quoi s'agit-il ?
Pour cette première année, dès la rentrée de septembre, cinquante étudiants pourront être accueillis. "C'est un plafond haut. On n'en aura peut-être pas autant la première année, mais c'est l'objectif. Il faut faire passer l'info", nuance le maire.
Comment se fera la sélection ?
Les candidats devront passer un concours "très sélectif", précise Florent Montillot, avant de rentrer en première année de médecine.
"C'est le système inverse de la France où les étudiants passent le concours à la fin de la première année, où 80% d'entre eux échouent", explique Serge Grouard.
Toutes les modalités n'ont pas encore été fixées mais les candidats devront probablement se rendre à Zagreb pour passer le concours, en fin d'année (mai ou juin, vraisemblablement), dans les mêmes conditions que les autres étudiants. Les détails (date, coût...) ne sont pas encore connus mais seront rapidement établis par la structure de type associatif qui sera créée en février pour affiner le protocole.
La formation pratique aurait lieu au CHR d'Orléans mais aussi dans les hôpitaux de Montargis, Pithiviers et Gien, ainsi que dans les cabinets des médecins en ville.
Le protocole prévoit aussi que des étudiants basés à Zagreb, actuellement en 6e année (des internes, donc), viennent faire des stages dans le Loiret, dès 2022.
Où auront lieu les cours ?
Les étudiants retenus étudieront la majorité du temps à Orléans mais aussi à Zagreb : un ou deux mois dans l'année, probablement. Cela reste à préciser encore dans la suite du protocole.
Mystère sur le lieu précis des cours à Orléans : le maire n'a pas voulu en dire plus.
Une chose est sûre : tous les cours se dérouleront en anglais. Soit en visio pour les cours magistraux et ceux dispensés par des professeurs de Zagreb, soit en présentiel pour ceux assurés par des intervenants (enseignants et/ou médecins) orléanais ou français. Des praticiens de l'hôpital seraient déjà partants. "On a des gens brillants", vante le maire.
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Combien ça coûte ?
C'est là que le bât blesse car les frais de scolarité sont bien plus élevés qu'en France, bien que la faculté de médecine de Zagreb soit publique. Le montant n'a pas encore été fixé mais le maire évoque "entre 5.000 et 10.000 euros" par an.
Mais il promet tout de suite la possibilité d'aides financières, notamment pour les plus modestes et/ou ceux qui seraient prêts à s'engager à venir exercer sur le territoire à l'issue de leurs études.
"On va en parler aussi avec la Métropole, le Département, la Région. Il faut une incitation."
Florent Montillot ajoute que ces frais, importants, englobent un "package complet", à savoir l'inscription mais aussi les cours de soutien, souvent très coûteux en France.
"Tout est fait pour offrir une garantie de réussite et de passage en deuxième année."
Sans compter que les Orléanais postulants n'auraient pas à payer un loyer d'étudiant.
Pourquoi Zagreb ?
Les premiers contacts de la Ville avec Zagreb remontent à 2017, détaille Florent Montillot. Et même avant car, en 2016, un projet de prépa médecine en lien, déjà, avec cette fac de Zagreb, avait capoté.
"Faute d'avoir eu un accord avec une faculté de médecine française, nous voulions une université de l'Union européenne, labellisée par les instances européennes, délivrant un diplôme européen et donc reconnu en France", insiste Serge Grouard.
La fac de Zagreb est réputée, attire des étudiants du monde entier avec un cursus en anglais. "C'est la seule d'Europe brevetée "High Quality"", précise Florent Montillot, ce qui démontrerait son standing et son niveau d'exigence.
Quid du projet de fac de médecine réclamé par plusieurs élus ?
La question agace le maire, qui a lui-même signé ce courrier de François Bonneau adressé au Premier ministre et demandant la création d'une faculté de médecine, dès cette rentrée, à Orléans, sous la houlette de celle de Tours.
Comment, dès lors, conjuguer ces deux projets ?
"Ils sont parfaitement complémentaires", assure-t-il, avant de déclarer avec véhémence : "Des gens meurent aujourd'hui car ils n'ont pas de médecin! Le reste n'a pas d'importance. Les deux pourraient cohabiter."
Pour lui, cette perspective apporte du concret : "Je suis le premier à critiquer l'Europe mais là, c'est un système intéressant pour nous et pour les étudiants. C'est gagnant-gagnant. On ne lèse personne et on ne demande pas d'aide financière extérieure. C'est une première en France. On impulse quelque chose de très novateur, dans l'intérêt général. Je ne vois pas qui pourrait s'y opposer." D'autant que tout est "bordé juridiquement", assure-t-il.
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